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Ubi societas ibi jus

Les règles de compétence en matière de justice pénale internationale

 

Lorsqu’on évoque la thématique de la justice pénale internationale, il s’agit de la répression, à l’échelle internationale, des crimes les plus graves. Une telle thématique, qui est le reflet de l’avènement ou tout au moins de la tendance vers une communauté internationale, peut être étudiée sous un double prisme, à savoir sous un prisme exclusivement juridique, mais également sous un angle politique. C’est sous le prisme du droit que se pose le problème des règles de compétence en matière de justice pénale internationale, autrement dit des conditions dans lesquelles une juridiction peut être saisie d’une affaire à caractère pénal. C’est sur lesdites règles de droit que nous nous appesantirons exclusivement dans la présente réflexion. Dans une approche essentiellement pédagogique, nous montrerons que la justice pénale internationale peut relever autant de la compétence des juridictions nationales que des juridictions internationales.


La compétence internationale des juridictions nationales en matière pénale


Les juridictions nationales sont pénalement compétentes, en matière internationale, sur la base de quatre règles de compétence.

La compétence territoriale

Dans ce cas d’espèce, la juridiction nationale est compétente parce que l’infraction a été commise sur son territoire, quelle que soit la nationalité de l’auteur ou de la victime.

La compétence personnelle

Elle a deux variantes :

La compétence personnelle active : ici, la juridiction nationale est compétente lorsque l’auteur de l’infraction, bien qu’elle est ait été commise à l’étranger, est un national.

La compétence personnelle passive : la juridiction nationale est compétente lorsque la victime de l’infraction, bien que commise à l’étranger, est un national. C’est en vertu de ce mode de compétence que la justice française s’est déclarée compétente pour juger un certain nombre de hauts responsables rwandais (à la suite de l’attentat du 6 avril 1994 contre les Présidents rwandais et burundais) et sénégalais (à la suite du naufrage du Joola) dans la mesure où certaines des victimes étaient de nationalité française.

La compétence réelle

Par la compétence réelle, la juridiction nationale est compétente lorsqu’il est porté atteinte à des intérêts nationaux depuis un territoire étranger (fabrication de la fausse monnaie locale, atteinte à la sûreté de l’Etat, etc.).

La compétence universelle

Elle a deux variantes :                                                                                                

La compétence universelle absolue : ici la juridiction nationale est compétente quel que soit le lieu de commission de l’infraction ou la nationalité de l’auteur ou de la victime. Ce type de compétence, prévu par les conventions de Genève de 1989 et la convention contre la torture de 1984 est difficilement envisageable.

La compétence universelle territorialisée : ici, la juridiction nationale est compétente pour les crimes commis à l’étranger, même si la victime ou l’auteur ne sont pas de sa nationalité, à condition que ce dernier soit arrêté sur son territoire. Cette variante de la compétence universelle justifie le procès contre Hissène Habré, ancien Président de la République du Tchad, au Sénégal.

Ce qu’il faut retenir, pour terminer, c’est que ces différentes compétences ne sont pas exclusives les unes des autres et peuvent être cumulées dans un même ordre juridique. Toutefois, elles ne s’exercent pas à l’égard des personnes qui jouissent des immunités diplomatiques (Chef de l’Etat, ministre des affaires étrangères, diplomates).


La compétence internationale des juridictions internationales en matière pénale


En matière internationale, on distingue les juridictions internationales ad hoc de la juridiction permanente (CPI).

Les juridictions pénales internationales ad hoc

On parle de juridictions pénales internationales ad hoc pour désigner les tribunaux internationaux dont la compétence est limitée aussi bien dans le temps que dans l’espace. Elle est limitée dans le temps dans la mesure où elle s’étend sur une période de temps clairement délimitée. Elle est limitée dans l’espace dans la mesure où elle ne concerne que des crimes commis sur des espaces territoriaux bien définis. Ces juridictions ont une compétence prioritaire sur celle des Etats, ce qui signifie qu’en cas de conflit de compétences entre les juridictions nationales et les Juridictions pénales internationales ad hoc sur des cas identiques, c’est la compétence de ces derniers qui prime.

Les juridictions pénales internationales ad hoc sont nombreuses. On peut citer le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), le Tribunal spécial pour la Sierra Léone (TSSL), le Tribunal spécial pour le Cambodge et le Tribunal spécial pour le Liban. Toutefois, nous ne nous attarderons que sur les deux premières qui sont les plus en vue.

Le TPIY a été établi le 25 mai 1993 par le Conseil de sécurité des Nations Unies agissant au titre du chapitre VII de la Charte des Nations Unies en vue de réprimer les violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991. Le TPIR en revanche a été mis en place par le Conseil de sécurité le 8 novembre 1994, en réaction aux actes de génocide et de violations massives du droit international humanitaires perpétrés sur le territoire du Rwanda et les Etats voisins entre le 1er janvier et le 31 décembre 1994.

La juridiction pénale internationale permanente : la CPI

La CPI est une juridiction permanente en ce sens que sa compétence n’est pas limitée dans le temps dès lors que son Statut, adopté le 17 juillet 1998, est entré en vigueur (le 1er juillet 2002). En outre, la compétence de la CPI n’est pas limitée dans l’espace et son Statut s’applique à tous les Etats dès lors que ceux-ci le ratifient ou y adhèrent.

Toutefois, la CPI a une compétence complémentaire à celle des Etats (article 1er), ce qui signifie qu’en cas de conflit de compétences entre la CPI et la juridiction d’un Etat, la seconde prime, la CPI n’étant compétente que si l’Etat ne veut pas ou ne peut pas juger les auteurs de crimes relevant de sa compétence.

Les crimes relevant de la compétence de la CPI sont le crime de génocide, le crime contre l’humanité, le crime de guerre et le crime d’agression (article 5). Les poursuites devant la CPI peuvent être engagées, soit par un Etat partie, soit par le Conseil de sécurité des Nations Unies, soit par le Procureur (article 13). Toutefois, en vertu de la mission que lui confère le chapitre VII de la Charte des Nations Unies, le Conseil de sécurité peut suspendre des poursuites engagées par la CPI (article 16).

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C
Très perspicace
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K
merci pour cette analyse cohérente...
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L
Cette présentation de la CPI me paraît pédagogique et convaincante pour le non-initié...<br /> <br /> http://bboeton.wordpress.com/2012/03/31/5529/<br /> Bien cordialement<br /> L'Abrincate
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T
Merci pour cette observation
A
<br /> <br /> Merci pour cette observation.<br /> <br /> <br /> <br />