La diplomatie est un métier difficile il faut le reconnaître. Elle exige des aptitudes très variées qui vont de la connaissance des langues et cultures étrangères à la maîtrise des aspects variés des relations internationales tels que le droit international, la politique internationale, l’économie internationale, les questions de géopolitique et de géostratégie, y compris l’art de la négociation, de la communication et de la civilité diplomatiques. Tout cela, un bon diplomate doit s’en approprier.
Toutefois, en dépit de ces multiples exigences dont la satisfaction n’est déjà pas aisée, le diplomate doit faire face à une autre difficulté. Celle-ci est d’autant plus amplifiée qu’elle repose sur un ensemble de paramètres qui le plus souvent échappent à la maîtrise du diplomate : je veux parler de la difficile conciliation entre les exigences familiales et les contraintes professionnelles, surtout en cas d’expatriation. En effet, le diplomate est naturellement appelé à exercer à l’étranger. Or l’expatriation à l’étranger s’accompagne de nombreuses contraintes qu’il est souvent difficile de concilier avec la stabilité familiale. Il s’agit par exemple de :
- la mobilité quasi-récurrente qui perturbe la scolarité de la progéniture ;
- des conditions de vie, de santé et de sécurité du pays accréditaire parfois précaires et dangereuses pour le diplomate et sa famille (l’actualité nous offre des cas patents comme le Japon qui vit une double catastrophe naturelle et industrielle, ou encore la Côte d’Ivoire et la Libye en proie une instabilité politico-militaire) ;
- il faut ajouter à cela que le conjoint est souvent appelé, soit à abandonner son poste de travail (parfois plus lucratif) pour suivre le diplomate affecté à l’étranger, soit à le laisser partir tout seul afin de conserver ledit poste.
Tout cela a pour conséquence que le corps de la diplomatie est dans la fonction publique celui où le taux de séparations conjugales et de difficultés scolaires des enfants est le plus élevé. Et ce problème n’est pas une spécificité africaine dans la mesure où le Livre blanc de la politique étrangère et européenne de la France le considère comme une « question lancinante » pour laquelle il est nécessaire de « mettre en place une politique volontariste s’adressant autant à l’agent qu’à sa famille ».
A ce titre, je pense que les pouvoirs publics camerounais, afin de se conformer à la constitution et aux lois nationales, doivent mettre sur pied des mécanismes qui protègent et encouragent la famille, en tenant compte de la spécificité du métier diplomatique. Pour cela, je propose que :
- le diplomate soit consulté avant une affectation à l’étranger ;
- le conjoint du diplomate affecté à l’étranger qui travaille obtienne prioritairement un poste d’affectation à l’étranger disponible et correspondant à sa formation. En cas d’impossibilité, il serait convenable de lui verser une indemnité de départ destinée à compenser son manque à gagner ;
- les postes à l’étranger soient répartis entre « postes familiaux » et « postes non familiaux » comme c’est le cas dans certaines organisations internationales. Les postes familiaux correspondraient à ceux qui sont propices à un départ à l’étranger avec sa famille (en termes d’opportunités d’emploi pour le conjoint ; de conditions de vie, de santé et de sécurité). Les postes non familiaux seraient ceux qui ne permettent pas de se déplacer avec sa famille. Dans ce dernier cas d’espèce, la durée en poste du fonctionnaire sera réduite, de même qu’il devra bénéficier d’une plus grande mobilité afin de rejoindre souvent sa famille.
En somme, le métier de diplomate est certes exaltant, mais aussi contraignant et exige de lourds sacrifices. Le diplomate ne doit pas en payer tout seul le prix ; pour cela, il est nécessaire que les autorités publiques reconnaissent la particularité de sa fonction afin d’initier les réformes qui s’imposent.