La présente réflexion a été inspirée et suscitée par les derniers rebondissements de la crise ivoirienne (pour autant qu'il s'agisse bien des
derniers rebondissements), suite à l'offensive des forces "néo-républicaines" pro-Ouattara (soutenues par la coalition franco-onusienne) contre le palais présidentiel du Plateau à Abidjan. La
crise actuelle qui ensanglante le pays de Didier Drogba anime et passionne les débats à toutes les échelles sociales. Pour un bon traitement de la question d'un point de vue scientifique,
l'anayse doit être portée à un diapason qui dépasse la grille de lecture Gbagbo-Ouattara, que ce soit du point de vue juridique (le contentieux post-électoral) ou politique (le rôle des acteurs
internes et externes).
Une crise au-delà du contentieux post-électoral
L'idée ici est de dire que la crise ivoirienne n'est pas née avec les élections présidentielles du 28 novembre 2010. Elle ne doit pas être
limitée à la question de savoir qui a gagné ou perdu les élections, mais remonte au décès du Président Houphouët Boigny et les guerres de succession qui s'en sont suivies. Il y a eu la guerre des
clans au sein des héritiers de l'houphouétisme, qui s'est soldée par le coup d'Etat de Noël 1999 sur fond d'ivoirité et d'intolérance croissante. Ensuite il y a eu la tentative de coup d'Etat du
19 septembre 2002 au cours de laquelle le pays a été agressé par une rebellion venue du Nord. Depuis cette date, la Côte d'Ivoire a été divisée sur le plan politique, géographique et
communautaire. Où était-elle, cette "communauté internationale" pour bouter hors de Côte d'Ivoire cette horde d'assaillants sans foi ni loi qui, pendant près de huit ans, ont régné sans partage
sur la moitié du pays ? Le sanglant contentieux post-électoral qui succède le scrutin de novembre 2010 n'est que le énième soubresaut d'un processus post-confictuel mal géré et d'une élection
précipitée car comment s'expliquer que la communauté internationale ait exigé la tenue de consultations électorales alors que la moitié du pays était encore occupée par des groupes lourdement
armés ? La responsabilité de la communauté internationale dans cette crise est grande même si elle n'occulte pas les initiatives critiquables des acteurs politiques de premier plan que sont
Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara. Quand bien même la victoire électorale ou militaire de l'un sur l'autre serait établie, seul un processus de réconcilliation sérieux de l'ensemble des
ivoiriens (et c'est possible) pourra à terme ramener une paix durable dans ce pays.
Une crise politique aux relents géopolitiques
La grille d'anayse Gbagbo-Ouattara de la crise ivoirienne (le paradigme de la quête du pouvoir politique) ne doit pas nous conduire à minorer
les influences et interférences exogènes, c'est-à-dire le rôle éminent des acteurs extérieurs à la Côte d'Ivoire. Les enjeux de la crise vont au-delà de ce pays et posent le problème de la
capcité des africains à régler les crises continentales, de même que le rôle des puissances étrangères dans la dialectique de la stabilité et de l'instabilité sur le continent noir. Cette crise
pose le problème de l'autonomie de décision de l'Afrique face à la rémanence des tentations néo-colonialistes et à la permanence des ingérences qui, depuis l'accession de la majorité des Etats à
l'indépendance et à la souveraineté internationale, n'ont cessé de subir les assauts dévastateurs des puissances impérialistes (pour des motivations et des intentions inavouées que chacun d'entre
nous peut s'imaginer). La crise ivoirienne nous enseigne que le sort de l'Afrique reste encore décidé hors d'Afrique, dans des officines ou les peuples et les dirigeants africains n'ont pas
accès. Et si le prétexte de l'ingérence démocratique peut être subtielement invoqué, de même que le paravent humanitaire rapidement brandi, il reste que la Côte d'Ivoire ne monoploise pas les
souffrances de l'humanité et l'on aimerait bien voir cette communauté internationale se mobiliser avec le même enthousiasme pour secourir les peuples en détresse dans toutes les parties du monde
(en Palestine par exemple).
Laurent Gbagbo a peut-être perdu les élections présidentielles de novembre 2010. Alassane Ouattara ne les a peut-être pas gagnées. Le problème
reste le même : tant que l'Afrique ne constituera pas une force de résistance à même de s'exprimer d'une voix commune, des futures Côte d'Ivoire (et Libye) s'annoncent en perspective ... au grand
dam des peuples africains.
La diplomatie est un métier difficile il faut le reconnaître. Elle exige des aptitudes très variées qui
vont de la connaissance des langues et cultures étrangères à la maîtrise des aspects variés des relations internationales tels que le droit international, la politique internationale, l’économie
internationale, les questions de géopolitique et de géostratégie, y compris l’art de la négociation, de la communication et de la civilité diplomatiques. Tout cela, un bon diplomate doit s’en
approprier.
Toutefois, en dépit de ces multiples exigences dont la satisfaction n’est déjà pas aisée, le diplomate
doit faire face à une autre difficulté. Celle-ci est d’autant plus amplifiée qu’elle repose sur un ensemble de paramètres qui le plus souvent échappent à la maîtrise du diplomate : je veux
parler de la difficile conciliation entre les exigences familiales et les contraintes professionnelles, surtout en cas d’expatriation. En effet, le diplomate est naturellement appelé à exercer à
l’étranger. Or l’expatriation à l’étranger s’accompagne de nombreuses contraintes qu’il est souvent difficile de concilier avec la stabilité familiale. Il s’agit par exemple de :
- la mobilité quasi-récurrente qui perturbe la scolarité de la progéniture ;
- des conditions de vie, de santé et de sécurité du pays accréditaire parfois précaires et dangereuses
pour le diplomate et sa famille (l’actualité nous offre des cas patents comme le Japon qui vit une double catastrophe naturelle et industrielle, ou encore la Côte d’Ivoire et la Libye en proie
une instabilité politico-militaire) ;
- il faut ajouter à cela que le conjoint est souvent appelé, soit à abandonner son poste de travail
(parfois plus lucratif) pour suivre le diplomate affecté à l’étranger, soit à le laisser partir tout seul afin de conserver ledit poste.
Tout cela a pour conséquence que le corps de la diplomatie est dans la fonction publique celui où le taux
de séparations conjugales et de difficultés scolaires des enfants est le plus élevé. Et ce problème n’est pas une spécificité africaine dans la mesure où le Livre blanc de la politique
étrangère et européenne de la France le considère comme une « question lancinante » pour laquelle il est nécessaire de « mettre en place une politique
volontariste s’adressant autant à l’agent qu’à sa famille ».
A ce titre, je pense que les pouvoirs publics camerounais, afin de se conformer à la constitution et aux
lois nationales, doivent mettre sur pied des mécanismes qui protègent et encouragent la famille, en tenant compte de la spécificité du métier diplomatique. Pour cela, je
propose que :
- le diplomate soit consulté avant une affectation à l’étranger ;
- le conjoint du diplomate affecté à l’étranger qui travaille obtienne prioritairement un poste
d’affectation à l’étranger disponible et correspondant à sa formation. En cas d’impossibilité, il serait convenable de lui verser une indemnité de départ destinée à compenser son manque à
gagner ;
- les postes à l’étranger soient répartis entre « postes familiaux » et « postes non
familiaux » comme c’est le cas dans certaines organisations internationales. Les postes familiaux correspondraient à ceux qui sont propices à un départ à l’étranger avec sa famille (en
termes d’opportunités d’emploi pour le conjoint ; de conditions de vie, de santé et de sécurité). Les postes non familiaux seraient ceux qui ne permettent pas de se déplacer avec sa famille.
Dans ce dernier cas d’espèce, la durée en poste du fonctionnaire sera réduite, de même qu’il devra bénéficier d’une plus grande mobilité afin de rejoindre souvent sa famille.
En somme, le métier de diplomate est certes exaltant, mais aussi contraignant et exige de lourds
sacrifices. Le diplomate ne doit pas en payer tout seul le prix ; pour cela, il est nécessaire que les autorités publiques reconnaissent la particularité de sa fonction afin d’initier les
réformes qui s’imposent.
On nous a longtemps fait croire que l’histoire c’est la connaissance du passé basé sur les écrits. Et
dans la mesure où le passé de l’Afrique reposerait essentiellement sur la tradition orale, l’Afrique n’aurait pas d’histoire. Quel étrange syllogisme basé sur des prémisses pour le moins
contestables. Dieu merci ! Ce mythe a été brisé et aujourd’hui, ils ne sont pas nombreux qui douteraient encore de l’existence d’une histoire africaine qui, certes prend appui sur la
tradition orale, mais s’inspire également des supports écrits et des ressources de l’archéologie. Il est désormais temps de passer à une étape supérieure, c’est celle de la consécration du droit
des africains à l’histoire. Mais quels seraient l’intérêt, la substance, de même que la portée de ce droit sui generis ?
L’intérêt d’un droit fondamental à l’histoire
La nécessité d’un droit fondamental à l’histoire dans le patrimoine juridique des africains est d’abord
un devoir de mémoire et de vérité. C’est un devoir de mémoire pour l’Afrique, dans le souci de briser les mythes et autres légendes selon lesquelles l’Afrique, au mieux, n’aurait pas d’histoire
et au pire, n’aurait qu’une histoire tragique et belliqueuse. Il s’agit donc de restituer la vérité et la réalité de l’histoire de l’humanité, des progrès que celle-ci a pu enregistrer grâce à la
contribution des acteurs africains. En quelques mots, le droit des africains à l’histoire trouve son intérêt dans le souci légitime de ceux-ci à la dignité et à la fierté pour la contribution
décisive qu’ils ont apportée à l’édification du monde. Et il ne s’agit pas seulement de connaître le plus exactement possible le passé, mais également de lutter contre l’oubli et contre toutes
les forces claires et obscures qui cherchent à provoquer l’oubli (Milan Kundera, Le livre du rire et de l’oubli, 1978).
Mais ce droit ne tire pas exclusivement ses ressources dans le miroir d’un passé plus ou moins glorieux
(les uchronies). Sa nécessité s’enracine également dans le contexte actuel de la renaissance africaine et de la globalisation. Ce plaidoyer vise ainsi à sédimenter l’émancipation des peuples
africains dans le présent et à tracer les voies de leur projection dans le futur : la rencontre du donné et du recevoir se fera avec l’Afrique ou ne se fera pas. L’histoire, notre histoire,
doit pouvoir parler avec nous (les africains doivent (ré) écrire leur histoire), sur nous (les africains doivent connaître leur histoire) et pour nous (les africains doivent tirer avantage de
leur histoire).
La substance d’un droit fondamental à l’histoire
Toutefois, parler du droit à l’histoire ne suppose pas de refaire l’histoire du droit. En ce sens, le
droit des africains à l’histoire entend s’inscrire dans la droite ligne des droits de la troisième génération (les droits de solidarité), pour reprendre la classification de Karel Vasak. Ainsi,
du point de vue de sa signification, le droit à l’histoire serait d’abord un droit procédural : c’est le droit des africains d’accéder à toutes les sources et données pour connaître leur
histoire, y compris celles qui se trouvent dans les musées et autres places fortes hors d’Afrique. Ce serait donc un droit de la revendication du patrimoine historique de l’Afrique. C’est
ensuite un droit substantiel ; ce qui suppose la connaissance par les africains de la véritable histoire de leur continent, par delà les clichés et autres mutilations, défigurations et
affabulations dont elle a fait l’objet pendant longtemps. En effet, c’est peu dire que d’affirmer que l’histoire de l’Afrique est peu connue, voire mal connue, y compris des africains eux-mêmes.
Cette histoire portera donc sur les civilisations, les institutions et les structures des peuples africains dans leur passé et leur présent, de même que leur contribution à l’histoire du monde.
Elle échappera de ce fait à la perspective « événementielle » dont la regrettable tendance est de mettre l’accent sur les accidents malheureux (la traite
négrière, la colonisation, les conflits, etc.) qui ne reflètent pas l’histoire réelle et véritable de notre continent.
La portée d’un droit fondamental à l’histoire
Admettre un droit fondamental à l’histoire dans le patrimoine juridique des africains suppose d’abord sa
consécration dans les textes juridiques. De ce point de vue, l’initiative, de mon point de vue, devrait d’abord se faire à l’échelle continentale, de préférence dans le cadre de l’Union Africaine
qui, il faut le souligner avec emphase, a entamé un remarquable mouvement juridique depuis le début des années 2000 avec l’adoption d’une vague importante de textes sur des domaines essentiels
tels que la démocratie, les élections et la gouvernance, la renaissance culturelle africaine, la corruption, les déplacés, les femmes ou encore la jeunesse (j’ai d’ailleurs fait un bref
commentaire de ce dernier texte). Le mouvement se poursuivrait à l’échelle nationale par l’adoption d’une législation destinée à implémenter le droit à l’histoire.
La portée du droit à l’histoire pose enfin la problématique de ses débiteurs et créanciers.
- Qui est le débiteur de ce droit ? Il s’agit des Etats africains, des Etats occidentaux, des
historiens, mais également de chacun d’entre nous, qui détient en lui une part de notre histoire à partager avec les autres. En particulier, les Etats africains, pour ce faire, doivent bâtir des
musées qui préservent les souvenirs de l’Afrique, ils doivent revisiter les livres d’histoire pour mieux les ancrer dans les valeurs africaines, adopter des législations qui protègent mieux les
sites et autres objets historiques de l’Afrique, des bourses sur les études portant sur l’Afrique doivent également être initiées et subventionnées.
- Quels en sont les créanciers ? Bien évidemment, il s’agit des peuples africains, dont le complexe
d’infériorité est souvent lié à l’ignorance de leur histoire et à la place que l’Afrique a occupé (et peut occuper) dans le monde. L’intérêt de la consécration d’un tel droit pour ces derniers
est qu’ils auront dès lors le droit de revendiquer la connaissance de leur histoire et les Etats, l’obligation de satisfaire cette exigence.
J’en suis convaincu, le droit des africains à connaître leur l’histoire, plus que jamais, s’impose sur le
continent. C’est une nécessité historique, une des conditions de l’émergence et de la renaissance africaine car, « à moins d’opter pour l’inconscience et l’aliénation, on ne saurait
vivre sans mémoire, ni avec la mémoire d’autrui. Or l’Histoire est la mémoire des peuples » (Joseph Ki-Zerbo, Introduction générale in Histoire générale de l’Afrique, vol. I,
p. 23).
La situation en Libye est sans nul doute le fait qui monopolise l’attention de la communauté
internationale en ce moment, à côté du drame que traverse le Japon suite au séisme et au tsunami qui ont ravagé une partie du pays le 11 mars 2011. Ainsi, le 17 mars 2011, le Conseil de sécurité
des Nations Unies a adopté la résolution 1973 (2011) en vue d’assurer la protection des civils et des secteurs où vivent des civils et d’assurer l’acheminement de l’aide humanitaire et la
sécurité du personnel humanitaire en Libye. Si l’objectif d’une telle résolution peut sembler noble dans son principe, au regard de la mission principale qui est celle du Conseil de sécurité des
Nations Unies (le maintien de la paix et de la sécurité internationales), celle-ci n’échappe pas à la grille de l’analyse critique, sur le triple plan de sa légalité, de sa légitimité et de son
efficacité.
Sur le plan de la légalité, il faut dire grosso modo que les résolutions du Conseil de sécurité
sont astreintes à des conditions de fond et de forme. Sur le fond, le Conseil doit se prononcer sur des questions qui relèvent de son domaine de compétence, à savoir précisément les questions qui
relèvent des chapitres VI (règlement pacifique des différends), VII (action en cas de menace contre la paix, de rupture de la paix, d’acte d’agression), VIII (accords régionaux) et XII (régime
international de tutelle) de la Charte des Nations Unies. En l’espèce, le Conseil prétend agir en vertu du chapitre VII (préambule de la résolution). Peut-on alors affirmer que la situation en
Libye représente une menace contre la paix, une rupture de la paix ou un acte d’agression ? Les membres du Conseil, pour justifier leur intervention relèvent, entre autres, les violations
flagrantes et systématiques des droits de l’homme, de même que les actes de violence et d’intimidation à l’égard des journalistes, des personnes des médias et des étrangers. Ce qui, de mon point
de vue, est suffisant pour justifier la mobilisation du chapitre VII de la Charte, en raison de l’envergure que l’on reconnaît aujourd’hui aux droits humains sur la scène internationale. C’est
sur la forme en revanche que la résolution pose problème. En effet, lorsqu’une résolution ne porte pas sur les questions de procédure (comme c’est le cas en l’espèce), elle n’est valide que si
elle a été prise par un vote affirmatif de neuf membres (au moins) parmi lesquels tous les membres permanents (article 27§3 de la Charte des Nations Unies). En l’espèce, la résolution a été
adoptée à une majorité de dix membres et cinq abstentions, dont celle de la Chine et de la Fédération de Russie, membres permanents du Conseil. Ce qui en principe aurait dû l’invalider. Il faut
toutefois reconnaître que cette pratique s’est vulgarisée au sein du Conseil et de nombreuses résolutions sont aujourd’hui prises sur des questions identiques sans le consentement formel de tous
les membres permanents (on est là en présence d’une coutume contra legem).
Sur le plan de la légitimité, la question est celle de savoir si la résolution correspond aux aspirations
de la communauté des Etats dans son ensemble. Certes, conformément à l’article 24 de la Charte, en s’acquittant des devoirs que lui impose sa responsabilité, le Conseil de sécurité agit au
nom de tous les membres des Nations Unies. Le problème de la légitimité ne devrait donc normalement pas se poser. Mais la composition du Conseil de sécurité aujourd’hui est contestée (voir mon
article sur la réforme des Nations Unies), notamment par un certain nombre de pays africains et émergents. C’est la raison pour laquelle les auteurs de la résolution recherchent le consensus le
plus large, en s’appuyant au besoin sur les condamnations formulées par la Ligue des Etats arabes, de même que l’Union Africaine et le Secrétaire Général de l’Organisation de la Conférence
Islamique sur les exactions commises par les autorités libyennes. Toutefois, une lecture du vote des membres du Conseil permet également de se faire une idée des lignes de fracture qui
caractérisent la communauté internationale face à la situation libyenne. En effet, l’essentiel des pays émergents membres du Conseil de sécurité se sont abstenus (les cinq abstentions sont celles
de la Chine, de la Fédération de Russie, du Brésil, de l’Inde et de l’Allemagne), tendance lourde qui traduit une certaine volonté de se démarquer du diktat des grandes puissances. En outre, bien
que tous les pays africains membres non permanents du Conseil (Afrique du Sud, Nigéria, Gabon) aient voté en faveur de la résolution, le Comité de l'Union Africaine sur la Libye a condamné le
recours à la force contre la Libye et appelé à la cessation immédiate des hostilités.
Du point de vue de son efficacité, permettez-moi d’abord de rappeler la substance des mesures préconisées
par la résolution du Conseil de sécurité pour remédier à la situation en Libye. Elles sont d’ordre judiciaire (saisine du procureur de la CPI pour l’examen des crimes commis, qui s’apparentent à
des crimes contre l’humanité), militaire (établissement d’une zone d’exclusion aérienne et application d’un embargo sur les armes), économique et financière (interdiction des vols et gel des
avoirs d’un certain nombre d’autorités libyennes). En outre, la résolution autorise les Etats à prendre toutes mesures nécessaires pour protéger les populations et les zones civiles menacées,
tout en excluant le déploiement d’une force d’occupation étrangère sous quelque forme que ce soit. Cet ensemble de mesures, hormis l’établissement de la zone d’exclusion aérienne, sont
aujourd’hui classiques et, de mon point de vue, n’ont jamais fait leur preuve. En revanche, la zone d’exclusion aérienne, qui vise à affaiblir les capacités de l’aviation libyenne ne pourra avoir
qu’une efficacité limitée dans la mesure où elle ne pourra pas mettre fin aux affrontements au sol où, semble-t-il, le pouvoir en place aura toujours le dessus. D’où la nécessité d’étudier de
façon plus approfondie l’approche diplomatique initiée par le Secrétaire général des Nations Unies, qui a demandé à son envoyé spécial de se rendre en Libye en vue de faciliter un dialogue qui
débouche sur les réformes politiques nécessaires à un règlement pacifique et durable de la crise libyenne.
C’est quoi être camerounais au 21e siècle ? Autrement dit, qu’est-ce qui fait l’identité
camerounaise aujourd’hui ? Cette question peut surprendre et déconcerter le lecteur pour deux raisons au moins : en premier lieu, les conditions d’acquisition et de perte de la
nationalité camerounaise semblent relever de l’évidence, ne serait-ce que d’un point de vue juridique, en raison de l’existence d’un code de la nationalité qui est suffisamment clair sur la
question. En second lieu, on peut bien se demander pourquoi problématiser la camerounité dans un contexte historiquement situé, à savoir le 21e siècle ? Une telle interrogation
semble suggérer qu’il y a des camerounais du siècle commençant et (qu’il y a eu) des camerounais du siècle précédent.
Toutefois, au-delà de ces inquiétudes, la question de la camerounité au 21e siècle garde son
intérêt pratique et sa pertinence scientifique dans la mesure où, dans un contexte de mondialisation, invoquer les particularismes nationaux peut sembler relever d’un anachronisme mal
placé.
Etre camerounais ne se limite pas à posséder la nationalité camerounaise
Conformément au code de la nationalité camerounaise (loi N° 68/LF/3 du 11 juin 1968), la nationalité
camerounaise s’obtient, soit à titre originaire (en raison de la filiation ou de la naissance au Cameroun), soit après la naissance (par l’effet du mariage, par déclaration de nationalité, par
l’effet de la naturalisation ou de la réintégration). Or, dans cette contribution, il s’agit pour moi de soutenir qu’être camerounais ne se réduit pas à posséder la nationalité camerounaise.
Autrement dit, l’approche juridique dans la définition de la camerounité est une condition certes nécessaire mais non point suffisante dans la mesure où elle occulte les autres dimensions –
historique, sociologique, politique, axiologique – qui permettent d’identifier les camerounais, au Cameroun et au-delà de nos frontières. Etre camerounais, dirais-je alors, c’est appartenir à une
patrie appelée Cameroun (où que l’on soit, quoi que l’on fasse), c’est partager et diffuser les valeurs qui sont celles de cette patrie, c’est faire preuve de citoyenneté telle que celle-ci se
conçoit et se perçoit dans une République, c’est-à-dire en termes de civilité (respect des règles de bienséance), de civisme (dévouement à l’intérêt public) et de solidarité (sentiment qui pousse
les hommes à s’entraider). Nationalité, citoyenneté et patriotisme vont donc de pair. C’est, pour moi, l’opérationnalisation de ce triptyque qui fait de nous des camerounais.
Etre camerounais dans un contexte de mondialisation
La mondialisation marque-t-elle la fin des nationalités ? Il faut dire, à l’observation, qu’au-delà
des thèmes d’universalisme, de cosmopolitisme ou de multiculturalisme que celle-ci charrie, la mondialisation apparaît davantage aujourd’hui comme le triomphe d’une culture, la culture
occidentale, sur le reste du monde. Une telle perspective est suffisante pour susciter un sursaut patriotique (on aurait dit nationaliste, si ce terme n'avait pas été discrédité par le
nazisme hitlérien, le fascisme mussolien et dans une certaine mesure le communisme stalinien) et un regain de vitalité des identités nationales (la fameuse dialectique
globalisation/fragmentation). En effet, notre camerounité est ce qui nous permet d’exister dans un contexte où le mot d’ordre est à la dilution et à l’assimilation, de protéger notre patrimoine
(culturel, économique, historique, etc.) contre les convoitises et autres tentatives d’appropriation et de captation extérieures (et intérieures). Cela suppose donc, non seulement de pouvoir
identifier véritablement ces valeurs qui font de nous des camerounais aujourd’hui, ces potentialités qui font notre fierté de camerounais, mais également de travailler à leur diffusion sur toute
l’étendue du territoire, y compris au sein de la diaspora, afin que tous les camerounais puissent se reconnaître dans la mère-patrie, au-delà du simple lien de nationalité qui nous unit.
Je voudrais donc dire, pour terminer, que le défi qui se présente au Cameroun et aux camerounais du
21e siècle est plus fort, plus urgent et nous interpelle tous. Quel Cameroun voulons-nous présenter à la face de ce nouveau monde globalisé ? Un Cameroun de prévaricateurs, de
mercenaires et de pirates prompts à se servir et à abandonner le bateau à la première secousse, bref un Cameroun de pseudo-camerounais, ou alors un Cameroun moderne, digne et compétitif, fier de
se présenter à la face du monde parce que conscient des valeurs dont il est porteur ?
Les diplomates servent-ils encore à quelque chose ? Une image d’Epinal veut
que l’activité du diplomate se réduise aux cocktails, aux cérémonies et aux tâches protocolaires. Or, au-delà de ces clichés, le métier de diplomate reste un métier d’envergure, avec ses
contraintes et ses particularités. De façon précise, un diplomate en position d’activité (par opposition au détachement ou à la mise en disponibilité) peut exercer soit au sein de
l’administration centrale, soit dans un poste à l’étranger. Chacune de ces positions correspond à des tâches précises.
Le diplomate en poste au sein de l’administration centrale
Contrairement à ce que l’on peut penser, le diplomate en poste à la Centrale exerce des responsabilités importantes, ceci en
fonction de la direction à laquelle il est affecté. En ce sens, de façon globale et indifférenciée, on peut citer tout d’abord, la rédaction des documents diplomatiques que sont les notes
verbales, les notes de prévision, de synthèse et de conjoncture sur des questions internationales ayant une incidence, soit sur la situation interne de son pays, soit sur la politique étrangère
du pays. En outre, il est chargé de l’élaboration et de la mise à jour de l’état des relations de son pays avec les autres pays de la communauté internationale. Ce dernier document est un support
fondamental de politique étrangère qui permet d’avoir une lisibilité et une visibilité quasi-complète de l’état des relations bilatérales entre son pays et le pays concerné, mais aussi et surtout
d’inspirer le dirigeant politique au moment d’entreprendre des négociations ou de prononcer un discours. Il est appelé à monter des dossiers techniques en vue de sommets internationaux auxquels
son pays doit prendre part.
Ensuite, le diplomate organise et participe aux cérémonies (fêtes nationales, présentation des vœux ou des copies figurées,
signature d’accords, cérémonies d’adieux, etc.) et audiences diplomatiques diverses. Ici, c’est le protocole qui est interpellé au premier chef, avec toute la délicatesse et les égards
particuliers qu’implique le cérémonial de chacun de ces événements.
En outre, c’est le diplomate qui sert d’interface entre les missions diplomatiques étrangères d’une part, le gouvernement
local et les populations d’autre part. En ce sens, les communications entre les missions diplomatiques et les autorités locales doivent interférer par lui, de même que les contentieux entre les
missions diplomatiques et les populations sont d’abord traités par ses services.
Enfin, le diplomate affecté à la Centrale peut être appelé à effectuer des missions à l’étranger, soit pour participer à des
sommets internationaux ou à des négociations, soit pour effectuer toute tâche qui lui est confiée par sa hiérarchie.
Le diplomate en poste à l’étranger
Le diplomate en poste à l’étranger (qu’il faut distinguer du fonctionnaire international) peut exercer, soit dans une mission
diplomatique, un poste consulaire ou une représentation permanente de l’Etat auprès d’une organisation internationale.
Le diplomate en poste dans une mission diplomatique est régi par la convention de Vienne du 18 avril 1961 et par un ensemble
de textes nationaux qui régissent sa fonction. De façon simplifiée, le diplomate en poste au sein de la mission diplomatique est chargé des relations politiques, économiques et culturelles entre
les deux Etats. Il s’agira de la représentation de l’Etat, de la négociation, de l’information (à travers des moyens licites), de la protection des intérêts de l’Etat et de ses ressortissants, de
même que la promotion des relations amicales entre l’Etat accréditant et l’Etat accréditaire.
S’agissant du diplomate en poste dans un poste consulaire, son activité est régie principalement par la convention de Vienne
du 24 avril 1963. Pour comprendre les tâches qui lui sont assignées, il convient de partir de ce que le poste consulaire est le service public de l’Etat à l’étranger. En ce sens, il est l’outil
par lequel les individus qui se retrouvent dans un Etat étranger peuvent avoir accès à certains services dont ils bénéficient lorsqu’ils sont sur leur territoire d’origine. Il s’agit par exemple
de l’état civil (transcription des actes de naissance, de mariage, de décès), de l’établissement des documents officiels (passeports, permis de conduire), de la délivrance des visas pour les
citoyens désirant se rendre dans son pays, de la protection de ses ressortissants en cas d’arrestation, d’accident grave ou de maladie. Toutefois, afin de bénéficier de ces services, il est
important que les ressortissants de l’Etat résidant dans la circonscription du consulat s’immatriculent auprès de lui. En outre, il n’est pas interdit qu’une mission diplomatique exerce également
des fonctions consulaires.
Enfin, le diplomate en poste dans une représentation permanente de l’Etat auprès d’une organisation internationale a en charge
la gestion des relations multilatérales de l’Etat avec l’organisation internationale en question et ses Etats membres. Il assure la présence continue de l’Etat auprès de cette organisation et
exprime ses positions officielles sur les questions ouvertes à discussion (vote des déclarations, résolutions, etc.). C’est également un haut lieu de la diplomatie de couloir.
En somme, les diplomates sont des acteurs multifonctionnels. Ils s’investissent à traduire dans les faits les options
diplomatiques des autorités politiques en place. Dans cette optique, le sens de l’initiative est très calculé, mais peu conseillé. Ici, on agit conformément aux instructions qui, parfois, doivent
provenir directement de la Présidence de la République. En effet, la diplomatie, comme la défense, est un domaine de souveraineté et, de ce fait, le « domaine réservé » du Chef
de l’Etat qui a donc la responsabilité de vouloir pour la nation toute entière.
Le procès international, comme toute activité humaine qui aspire
au succès, obéit à une vision stratégique. J'ai l'honneur de vous livrer ici un résumé de mon mémoire de fin de formation en relations internationales soutenu à l'IRIC sur le thème "La défense
des intérêts de l'Etat devant le prétoire international. Recherches sur la politique juridique extérieure du Cameroun". Il s'agit des stratégies de l'Etat camerounais pour faire de sa
présence et de son action devant le prétoire international un moyen en vue de réaliser ses objectifs de politique étrangère.
La politique juridique extérieure n’est pas un champ d’étude suffisamment exploré dans les pays en développement. Il n’en
demeure pas moins que sa pratique n’est pas absente de la vie internationale de ces Etats, y compris devant le prétoire international. Dans ce sens, la présente étude vise à objectiver la
politique juridique extérieure du Cameroun à la lumière de la défense des intérêts de l’Etat devant le prétoire international. Il en ressort que cette politique, dont la finalité est de faire
de la présence et de l’action de l’Etat devant le prétoire international un instrument en vue de la réalisation des objectifs de politique étrangère, s’articule autour de deux grands
axes.
En premier lieu, la politique juridique extérieure du Cameroun concerne le choix du prétoire international
« intéressant ». Cela s’explique par le fait que sur la scène internationale, la soumission de l’Etat à la justice internationale n’est pas obligatoire et il appartient à ce
dernier d’opérer le choix du prétoire le plus à même de rendre une décision qui lui est avantageuse. Pour le Cameroun, ce choix s’opère de préférence à l’avance et exceptionnellement au cas par
cas. Une telle alternative est le reflet d’un double objectif. D’une part, il s’agit de traduire dans les faits les principes de présence et de participation de la diplomatie camerounaise et de
promouvoir une certaine image de l’Etat sur la scène internationale. D’autre part, il s’agit de minimiser au mieux les risques de perte du procès.
En second lieu, la politique juridique extérieure du Cameroun s’intéresse au droit applicable le plus
« pertinent » devant le prétoire international. C’est ici que se déploient les stratégies de l’Etat en vue de la mobilisation du droit le mieux à même de faire triompher les
prétentions de l’Etat avec, à terme, l’objectif politique de réduire les risques de perte des procès impliquant l’Etat. Très concrètement, l’Etat camerounais tente au mieux de tirer profit des
marges de manœuvre que lui offre le droit international. Il s’agit de privilégier le recours consensuel au prétoire international et, dans le même temps, de tenter de neutraliser les saisines
unilatérales initiées par la partie adverse, y compris toutes les manœuvres qui tentent de retarder la décision définitive du juge. En ce qui concerne le fond du litige, le Cameroun privilégie
les règles et normes de droit qui lui sont favorables et, lorsque la nécessité l’impose, il fait le choix de l’interprétation qui va dans le sens de ses intérêts.
Toutefois, l’un des points faibles d’une telle politique reste la question de la représentation de l’Etat devant le
prétoire international, dont la forte décentralisation dans le contexte camerounais en fragilise l’efficacité, d’où la nécessité de coordonner la compétence de représentation de l’Etat du
Cameroun devant le prétoire international.
In developing countries, external legal policy is a domain on which research has not been sufficiently carried
out. This however does not mean that the practice is totally ignored in States’ interactions including before an international jurisdiction. To this effect, this study has as objective to show
the extern legal policy of Cameroon in the light of the defense of the State’s interests before the international jurisdiction. It becomes clear from this study that, the external legal policy
of Cameroon from the point of view of the defense of the interests of State rotates around two axes.
Firstly, Cameroon’s external legal policy is deployed in respect of the choice of the international
“interesting” jurisdiction. This is justified by the fact that, on the international scene, a State is not obliged to comply to an international jurisdiction coupled with the fact that
a State is free to resort to a jurisdiction it deems the decision will be in its favor. For the State of Cameroon, this choice is made preferably in advance and exceptionally case after case.
This type of alternative thus reflects a double goal. It consists of demonstrating in reality, the principle of Cameroon’s diplomatic presence and participation and fostering the State’s image
on the international scene on one hand and minimizing the risk of an unfavorable judgment on the other hand.
Secondly, Cameroon’s external legal policy is interested in the “relevant” applicable law before an
international jurisdiction. It is thus here that the State’s stratagem in respect of the most pertinent law, be it from the procedural or from the judgmental point of view are deployed.
More concretely, the Cameroonian State tries as much as possible to take advantage of the tactics it is being offered in international law. This consists of prioritizing a consensual resort to
an international jurisdiction and, otherwise, to try neutralizing unilateral suing from the part of the adverse party including all the exercises aiming at delaying the judge’s final decision.
In what concerns the depth of the judgment, Cameroon prioritizes the rules and norms of law that are favorable to her, and when deemed necessary, she carries out an interpretation which favors
her interests.
However, one of the weaknesses of this external legal policy remains that of a State’s representation before
an international jurisdiction, where the strong decentralization in the Cameroonian context weakens the efficiency, thus making it inevitable to coordinate the competence of the Cameroonian
State’s representation before the international jurisdiction.
Au moment où les préoccupations environnementales prennent de l'envergure dans l'agenda national et international, j'ai souhaité vous livrer ici un résumé de mon mémoire de DESS en Contentieux
International, intitulé "La protection de l'environnement dans le cadre du pipeline Tchad-Cameroun". L'objet de cette étude était de voir comment concilier les préoccupations environnementales
avec un projet de développement d'ampleur comme le pipeline Tchad-Cameroun, autrement dit, comment implémenter le développement durable au Cameroun.
La protection de l’environnement au Cameroun, en matière de
transport international des hydrocarbures, a connu une évolution fulgurante à l’épreuve du projet pipeline Tchad-Cameroun. Parti d’un stade que l’on pourrait qualifier de vide juridique, le
Cameroun, en relation avec les autres partenaires du projet, s’est doté d’un corps de règles spécifiques dont l’objectif est d’en garantir la gestion optimale.
A l’observation, le dispositif juridique mis sur pied a
permis de réglementer un projet considéré comme écologiquement dangereux par la Banque Mondiale, au regard des risques multiples qu’il fait peser sur l’environnement. Au plan institutionnel, des organismes nationaux et internationaux
ont été créés ou aménagés, soit pour assurer la mise en œuvre des engagements environnementaux, soit pour en garantir le contrôle.
Cependant, au-delà de l’adoption d’un cadre juridique et
institutionnel applicable à ce projet, le problème de son efficacité reste posé, en raison des cas de non conformité environnementale relevés au fil du temps. C’est que le dispositif normatif, en
plus des carences liées à son ineffectivité, n’a pas surmonté les insuffisances traditionnelles du droit de l’environnement : complexité dans la formulation des prescriptions à respecter,
absence de formulation claire des objectifs environnementaux à atteindre et des méthodes à suivre.
En outre, au plan institutionnel, il subsiste le problème de
la capacité financière et technique, voire de la bonne volonté des organismes en charge de la gestion des questions environnementales liées au projet. C’est la preuve que ce cadre juridique et
institutionnel de protection environnementale reste à parfaire, tant pour la gestion future du projet qu’en ce qui concerne les autres projets d’envergure entrepris par la République
du Cameroun et dont les risques environnementaux sont réels.
The protection of environment in Cameroon has
evolved spectacularly in the contact of the pipeline Chad-Cameroon project, concerning the international transportation of hydrocarbons. From a stage considered as a gap in the law, the State of
Cameroon, in relation with its other partners in the project, has endowed itself with specifical rules which objective is to grant an optimal management of the project.
In this way, the legal system set up has allowed
regulating a project considered as ecologically dangerous by the World Bank, on account of the numerous threats on environment it generates. From the institutional viewpoint, some national and
international agencies have been created or adjusted in order to ensure the implementation and the monitoring of environmental commitments.
However, beyond the adoption of a legal
and institutional framework, the problem of its effectiveness remains. The reasons of that are the environmental non conformity cases observed. This is because of the fact that the legal system,
in addition to its deficiencies due to the lack of some rules of law, didn’t settle the traditional shortcomings of the environmental law: complex rules of law, obscure objectives and methods.
Besides, concerning the institutions, it remains the problem of their financial and technical capacity, even their good will. This if the proof that the legal and institutional framework set up
in order to ensure the protection of environment should be improved. It should be improved first to secure the future management of the pipeline Chad-Cameroon project, then to secure the other
great projects undertaken by the Republic of Cameroon.
c'est peut-être inhabituel mais vous me pardonnerez sans doute. L'année a été longue et studieuse et je dois dire que je suis actuellement à bout de souffle, pour ne pas dire en mal
d'inspiration. Mais je voudrais partager avec vous une autre actualité,celle de la fin d'année. Et j'ai souhaité le faire en musique, afin que celle-ci nous accompagne mélodieusement jusqu'à la
nouvelle année. C'est une chanson de Fally Ipupa et Mokobé sous le titre "Malembe". Au-delà de la belle sonorité le message est fort, c'est celui de la paix, de l'unité et de la richesse de notre
cher et beau continent.
A tous et à chacun, à vous qui avez bien voulu partager mes réflexions, en y joignant quelquefois vos commentaires (que je souhaite d'ailleurs plus nombreux en 2011 afin de rendre le débat plus
interactif), je vous dédie cette chanson, mais surtout je vous souhaite une excellente année 2011. J'espère que cette nouvelle année vous comblera dans chacun de vos projets.
La Charte africaine de la jeunesse a été adoptée par la septième session ordinaire de
la conférence de l’Union Africaine le 2 juillet 2006 à Banjul (Gambie). C’est un traité au sens de l’article 2 de la convention de Vienne sur le droit des traités du 23 mai 1969 (en ce sens qu’il
est obligatoire à l’égard des Etats signataires), composé d’un préambule et d’un dispositif de 31 articles. Le dispositif comporte deux parties dont la première (articles 1er à 28)
porte sur les droits et devoirs tandis que la seconde (articles 29 à 31) porte sur les dispositions finales.
Ce qu’il faut souligner d’emblée c’est que l’un des mérites de ce texte est de
procéder à une identification claire de la catégorie sociale générationnelle qu’est la jeunesse qui renvoie, non pas aux personnes âgées de 7 à 77 ans comme on le dit souvent de façon simpliste,
mais « signifie toute personne âgée de 15 à 35 ans » (préambule in fine). Le jeune se distingue donc du mineur dont le soin de la détermination est laissée à la
discrétion de chaque Etat partie (au Cameroun, on distingue la minorité civile [moins de 21 ans], de la minorité électorale [moins de 20 ans] et de la minorité pénale [moins de 18 ans]) et de
l’enfant, que la Convention des Nations Unies relatives aux droits de l’enfant du 20 novembre 1989 considère comme « tout être humain âgé de moins de dix-huit ans, sauf si la majorité
est atteinte plus tôt en vertu de la législation qui lui est applicable » (article 1er). Cette perception de l’enfant est reprise par la Charte africaine des droits et du
bien-être de l’enfant (article 2) de 1990.
Sur le fond, la Charte africaine de la jeunesse, il faut le dire, n’est pas un texte
révolutionnaire. « Certes convaincus que la plus grande richesse de l’Afrique est la jeunesse de sa population, et que par la participation pleine et active de celle-ci, les Africains
peuvent surmonter les difficultés auxquelles ils sont confrontés » (préambule de la Charte), les plénipotentiaires africains ont entendu mettre sur pied un texte qui vise à assurer
l’épanouissement des jeunes africains au sein de la population globale, tout en mettant à la charge des Etats des « soft obligations » et en respectant le particularisme
contextuel de l’Afrique.
Je voudrais donc m’appesantir exclusivement sur la première partie de ce texte
(articles 1er à 28) afin de mettre en lumière les droits reconnus aux jeunes africains, mais aussi les obligations qui en découlent, y compris pour les autres acteurs concernés par ce
texte.
Les droits reconnus par la Charte au profit des jeunes
africains
A l’évidence des faits, un être ignorant de ses droits ne saurait en tirer profit.
C’est un truisme de dire qu’on ne revendique pas ce qu’on ne connaît pas. Il s’agit donc ici de mettre en lumière les différentes prérogatives reconnues aux jeunes africains, et qu’ils auraient
légitimement le droit de revendiquer. On va distinguer entre les droits reconnus à toute personne et que la Charte reprend au bénéfice des jeunes et les droits spécifiques consacrés au profit de
cette catégorie sociale générationnelle.
Les droits reconnus à toute personne et repris au compte des jeunes par la
Charte
Je ne serai pas exhaustif dans cette partie et je me contenterai de reprendre les
droits consacrés, dans la mesure où, en réalité, il ne s’agit pas d’une grande nouveauté. Mais puisque, semble-t-il, la répétition est la mère des sciences, il n’est pas superflu de les
rappeler.
A cet effet, la Charte renforce au bénéfice des jeunes, le droit à la non
discrimination (article 2), à la liberté de circulation (article 3), à la liberté d’expression, en particulier « tout jeune a le droit d’exprimer librement ses idées et ses opinions
relatives à tous les sujets et de diffuser ses idées et ses opinions, sous réserve des restrictions prévues par la loi » (article 4), à la liberté d’association (article 5), à la
liberté de pensée, de conscience et de religion (article 6), à la protection de sa vie privée (article 7), à la protection de sa famille (article 8), à la propriété (article 9), au développement
(article 10), à la participation (article 11), à des moyens de subsistance durables et à l’emploi (article 15), à la santé (article 16), à la paix et à la sécurité (article 17), à l’application
de la loi (article 18), au développement durable et à la protection de l’environnement (article 19), à une culture qui protège les valeurs morales et traditionnelles reconnues par la communauté,
de même qu’un savoir fondé sur les NTIC (article 20), le droit de vivre partout dans le monde, y compris de constituer une diaspora (article 21), à des loisirs, activités socio-éducatives,
sportives et culturelles (article 22).
Cet ensemble de droits, nous l’avons déjà dit, sont reconnus à toute personne
humaine, la Charte s’est donc contentée de les réitérer au profit des jeunes africains, mais elle en a également consacré d’autres de façon spécifique.
Les droits spécifiques reconnus aux jeunes africains par la
Charte
Parce que la Charte africaine de la jeunesse est un texte spécifique et que les
jeunes constituent une catégorie sociale spécifique au sein de la société, il était de bon ton qu’elle leur consacre des droits qui tiennent compte de cette double spécificité. C’est cela
l’apport majeur de ce texte dans le droit international africain, mais également dans le contexte socio-politique des Etats africains. A ce titre, la Charte, d’emblée, consacre le droit à une
politique nationale pour les jeunes, dont « l’élaboration devra se fonder sur une consultation massive des jeunes et devra prévoir la participation active de tous ces derniers à tous les
niveaux de prise de décision et de gouvernance relatives aux sujets qui concerne la jeunesse et la société en général » (article 12). Voilà une disposition fort intéressante dans
laquelle s’inscrit certainement la création au Cameroun du Conseil national de la Jeunesse. Mais à quand des ministres « jeunes »(« jeunes » au sens de la
Charte), principalement dans les départements qui s’occupent des problèmes particuliers de cette catégorie sociale ou des quotas pour jeunes dans les assemblées représentatives (parlement,
conseils municipaux par exemple) ? Je pense que ce serait le moyen le plus approprié et le plus efficace de faire participer les jeunes à la prise des décisions qui les concernent.
En outre, la Charte reconnaît aux jeunes africains le droit au développement de
l’enseignement et des compétences, incluant le droit à une éducation de bonne qualité qui « favorise la pensée critique plutôt qu’un bourrage d’esprit » (article 13.4.i),
l’incitation à la recherche (article 13.6) et l’établissement de partenariats entre les entreprises implantées sur le sol africain et les structures de formation afin de contribuer au transfert
de technologies qui devrait profiter aux jeunes étudiants et chercheurs africains (article 13.7).
Enfin, la Charte consacre une protection particulière pour les filles et les jeunes
femmes contre la discrimination à l’éducation, à l’emploi, à la santé, et contre toutes formes de violence (article 23), une protection particulière pour les jeunes ayant des besoins spécifiques,
notamment les jeunes handicapés mentaux et physiques (article 24) et le droit à l’élimination des pratiques sociales et culturelles néfastes, à savoir les us et coutumes qui affectent la santé,
la vie ou la dignité des jeunes, les us et coutumes inégalitaires envers les jeunes se basant sur la différence des sexes, de l’âge ou d’autres critères (article 25). En quelques mots, autant le
respect des aînés reste une obligation fondamentale des jeunes comme nous le verrons plus loin, autant les pratiques rétrogrades du « sexisme » et du
« grand-frérisme » qui si souvent ont causé du tort à l’Afrique en général et aux jeunes en particulier sont condamnées.
Les obligations découlant de la Charte
La Charte africaine n’énumère pas uniquement des droits au profit des jeunes, elle
comprend également des obligations qui concernent autant les jeunes eux-mêmes que les Etats et la Commission de l’Union Africaine.
Les responsabilités des jeunes africains au titre de la
Charte
Conformément à l’article 26 de la Charte, le jeune a des devoirs envers sa famille,
la société, l’Etat et la communauté internationale. Ce qui inclut, entre autres, de « respecter ses parents et les personnes âgées et les assister en cas de besoin dans le contexte des
valeurs positives africaines (…) ; prendre pleinement part aux devoirs du citoyen y compris le vote, la prise de décision et la gouvernance (…) ; s’engager dans des activités de
volontariat et de bénévolat (…) ; adopter une éthique de travail intègre et ne pas s’adonner à la corruption (…) ; promouvoir le patriotisme, l’unité et la cohésion de l’Afrique
(…) ; protéger l’environnement et conserver la nature ». Pour moi, cela va de soi car si les jeunes veulent être des acteurs fiables et à part entière de la société, avec des
droits qu’ils peuvent légitimement revendiquer, ils doivent également se distinguer par leur exemplarité et surtout pouvoir se montrer comme des personnes à qui l’on peut légitimement et
objectivement faire confiance. Le respect de ces quelques obligations, qui ne sont qu’indicatives, y contribuerait grandement.
Les devoirs de l’Etat en vertu de la Charte
Il n’est pas superflu de rappeler que tous les droits consacrés par la Charte au
profit des jeunes, sous réserve de ce que l’un quelconque des Etats qui a ratifié ou adhéré à la Charte ait émis des réserves, constituent des obligations pour celui-ci. Toutefois, de façon plus
globale, « les Etats parties s’engagent à prendre les mesures nécessaires, conformément au processus constitutionnel et conformément aux dispositions de la présente Charte pour adopter
les mesures législatives et les autres mesures requises pour appliquer les dispositions de la Charte » (article 1er). Au Cameroun par exemple, nous pensons donc qu’une fois
que la Charte aura été ratifiée (un projet de loi autorisant le Président de la république à ratifier cette Charte a été soumis à l’Assemblée Nationale lors de sa troisième session ordinaire de
l’année 2010), il serait logique qu’un débat soit ouvert sur une loi nationale relative à la jeunesse, ceci en vue de renforcer le dispositif normatif d’encadrement de la catégorie jeune.
En outre, les Etats s’engagent à vulgariser la Charte, notamment à promouvoir et
assurer son enseignement, son éducation et sa publication (article 27). C’est également à ce prix que la Charte, mais surtout les droits et obligations qui y sont consacrés passeront de la
fiction à la réalité et du vœu pieux à une effectivité que nous souhaitons vivement.
L’obligation de la Commission de l’Union Africaine
Cette obligation, bien que formulée à l’égard de la Commission de l’Union Africaine
(article 28), interpelle également au premier chef les Etats. Il s’agit pour la Commission de veiller à ce que les Etats parties respectent les engagements et obligations stipulés par la Charte,
notamment en enjoignant les Etats membres à inclure des représentants de la jeunesse, comme membres de leurs délégations aux sessions ordinaires de l’Union Africaine et autres réunions
pertinentes des organes politiques. La question que l’on peut toutefois se poser est celle de savoir les mesures que peut prendre la Commission en cas de non-respect de tels engagements par les
Etats. Cela reste un mystère qui, en réalité fragilise tout l’édifice juridique de la Charte et dont l’efficacité dépendra finalement et essentiellement du sens de l’initiative que pourront avoir
les membres de la Commission à un moment donné, mais surtout du bon vouloir des Etats, si non de la capacité d’action et de revendication des principaux bénéficiaires de ce texte, à savoir les
jeunes eux-mêmes.
En conclusion, l’ordre juridique africain a été enrichi par un nouvel instrument
destiné à assurer l’affirmation des jeunes ; il s’agit de la Charte africaine de la jeunesse du 2 juillet 2006. Il revient à présent à ces deniers de s’en approprier et d’en faire un outil
au service de leur épanouissement. Toutefois, afin de pouvoir en tirer un meilleur profit, les jeunes doivent progressivement et continuellement se regrouper et s’organiser afin de passer du
stade de simple strate sociale à celui de classe sociale, au sens marxiste du terme, c’es-à-dire une catégorie sociale consciente d’elle-même, de son identité, de son potentiel, de ses besoins et
de ses intérêts.